« Les maladies sont catastrophiques mais pas inutiles. Le lymphome a été pour moi un accélérateur de vie », nous explique calmement Catherine.
Il est peu dire que le lymphome a bouleversé la vie de cette pétillante quadragénaire.
Quand elle nous accueille dans sa maison en bord de mer, il est évident que cette femme s’est battue. Derrière son sourire, on imagine le chemin parcouru ces 20 dernières années.
A 26 ans, Catherine est chef de produit dans une entreprise agroalimentaire. Son truc c’est le marketing et la communication.
Nous sommes en 1996, Catherine a rencontré son futur mari 5 ans plus tôt. Un soir, ils lisent côte à côte quand la jeune femme ressent une douleur dans la poitrine, « j’avais beaucoup de difficulté à respirer ».
Les douleurs s’apaisent puis reviennent le lendemain, « une douleur incroyable », se souvient-elle.
Je fais une prise de sang, une radio des poumons… Je prends peur quand je vois la tête des médecins après le scanner.
Vient le moment de l’attente.
Catherine est en arrêt de travail, fait une autre batterie d’examens, « j’ai eu une biopsie bronchique sans anesthésie, on m’a finalement opérée pour prélever directement… et recousue à vif après le retrait du drain ».
Trois semaines plus tard, le diagnostic est posé : c’est un lymphome non hodgkinien.
« Mes parents sont effondrés : un enfant en danger, ce n’est pas dans l’ordre des choses. Moi, dès que l’on m’a expliqué le protocole, je n’ai jamais douté de la guérison. Et mon compagnon m’aide beaucoup en ne me renvoyant pas l’image de quelqu’un de malade ».
Catherine sort de gros classeurs d’un placard, c’est le calendrier des séances de chimiothérapie de l’époque : « la chimio m’a déglinguée. J’étais un zombie. Je dormais la plupart du temps, j’avais l’impression d’être un corps mort enfoncé dans le matelas. »
A l’époque, la prise en charge du patient n’est pas la même qu’aujourd’hui :
Pas de soin de support, pas de psychologue, pas de prise en charge de la douleur. Même s’il fallait piquer 5 fois pour poser l’aiguille, on me faisait toutes les chimios dans les veines, il n’y avait pas de chambre implantable.
La fin des traitements approche, Catherine reprend le boulot en mi-temps thérapeutique mais ça ne colle plus vraiment : « je n’ai jamais retrouvé ma place, j’avais perdu confiance en moi, je sentais que je devais redémarrer quelque chose ailleurs, dans une boite qui ne savait rien de mon passé. »
Catherine va mieux, une grosse entreprise de la restauration rapide l’embauche et à l’été 1998 elle se marie avec celui qui partage sa vie depuis 8 ans.
Mais sentimentalement les choses ont aussi évolué : « Je suis devenue très impatiente après la maladie, j’ai pris conscience de l’urgence à vivre. Je voulais quitter Paris, vivre au bord de l’océan… Finalement, mon mari et moi n’avions plus la même façon de voir la vie ».
Les sentiments s’effilochent et Catherine finit par quitter celui qui l’a accompagné pendant sa maladie. Elle insiste sur le fait qu’elle n’avait rien à lui reprocher. Ils ne partageaient plus les mêmes envies. Simplement.
Suit une période un peu euphorique où tout se bouscule : « une vie professionnelle bien remplie », et le retour d’une passion, la plongée sous-marine… qui accompagnera rapidement un amour naissant : Jean-Marie.
« L’amour pour l’eau nous a réunis », nous glisse-t-elle en souriant.
En 2003, Catherine tombe enceinte :
J’étais hilare, avec les traitements que j’avais subis, ça me paraissait complètement fou !
Martin arrive dans leur vie en 2004, il sera suivi par Pierre en 2007. Entre temps il y aura eu l’achat de leur maison et un mariage en août 2005 ! « Une vie à toute allure ! »
Mais en 2009, Catherine apprend qu’elle souffre d’un cancer du sein. « J’ai 40 ans, et je me dis ‘mince à la fin, pourquoi moi, encore ?!’ Je suis en colère. Mais confiante. J’ai guéri une fois. Je vais guérir encore. »
Chimiothérapie. Mastectomie. Reconstruction. Radiothérapie. C’est dur, mais Catherine s’en remet … Et il devient urgent de concrétiser un rêve : « vivre au bord de l’océan ».
En 2012 c’est donc le déménagement au Croisic.
Mais Catherine est essoufflée : « Sur un scanner à Nantes, ils découvrent que j’ai des métastases plein les poumons ».
C’est le choc.
Quand on apprend une récidive métastatique on entre dans autre chose. On comprend qu’on ne guérira plus. On sait qu’on va mourir plus vite que prévu.
Catherine s’effondre, c’est un tsunami pour elle qui a déjà encaissé deux cancers : « Le médecin ne parle plus de vie mais de survie ».
Catherine comme toujours résiste, et le traitement fonctionne : « des hormones tiennent les métastases en respect ».
Alors elle s’accroche : « j’ai repris le dessus quand j’ai demandé à mon oncologue de me dire non pas le temps qu’il me restait à vivre, mais le temps le plus long qu’une de ses patientes a vécu avec la même chose que moi. Il a répondu 15 ans et elle vit encore ! C’est à ça que je m’accroche. Alors voilà ! Je le sais. Je n’y pense jamais. Et je ne survis pas, je vis ! »», s’exclame-t-elle déterminée.
Elle écrit notamment un blog plein d’humour où elle raconte en finesse sa maladie :
« Les crabes dansent au croisic ».
Surtout la vie continue au Croisic ! Les enfants grandissent, son mari a tout quitté pour devenir marin-pêcheur. Et Catherine, petit bout de femme, avance : « Je suis super occupée ! Ce qui sauve, ce sont les projets, de rester dans la vie. Finalement c’est un mélange de conscience et d’inconscience ! »
http://wearepatients.com/lymphomes/catherine-je-ne-survis-pas-je-vis-11596/