• Urgences oculaires non traumatiques

    URGENCES OCULAIRES NON TRAUMATIQUES

    ET MÉDECIN GÉNÉRALISTE

    http://www.univ-st-etienne.fr/facmed/finit/ophturg/urgntrom.htm

    Dr Guilhem Cartry (CH de Firminy)  gcartry@hotmail.com

    Dr Philippe Gain (CHU de St-Etienne) philippe.gain@univ-st-etienne.fr

    I - ŒIL ROUGE

    L'œil rouge est la situation d'urgence oculaire la plus commune. La première chose à faire est de rechercher et d'éliminer un facteur … traumatique car la démarche sera totalement différente.

    Il s'agit d'un signe d'appel fréquent et totalement aspécifique, de la simple conjonctivite au glaucome aigu. Les éléments à considérer et à analyser sont :

    -          L'acuité visuelle, normale, peu modifiée, modifiée ou effondrée.

    -          La notion de douleur : la réponse est immuablement oui, il faut donc séparer ce qui est une véritable douleur d'une sensation de sable, de brûlure, de prurit.

    -          La rougeur : en nappe homogène, diffuse ou non, ou dilatation des vaisseaux conjonctivaux normaux.

    -          L'aspect de la cornée : reflet brillant et transparence normale, cornée claire, terne voire «glauque », opacité blanchâtre localisée ou diffuse.

    ŒIL ROUGE NON DOULOUREUX

    Hémorragie sous conjonctivale

                L'acuité visuelle est normale, il n'y a pas de photophobie. La rougeur est franche en nappe, homogène, localisée à diffuse, et n'est pas due à une dilatation des vaisseaux conjonctivaux. L'étiologie habituelle est la fragilité capillaire du sujet âgé. Les efforts violents à glotte fermée responsable d'une hyperpression veineuse cave supérieure (constipation, opiniâtre, accouchement, toux violentes), l'hypertension artérielle maligne et les troubles de la coagulation peuvent être en cause.

                    Il faut rechercher un syndrome hémorragique cutanéo-muqueux, éliminer un traumatisme et se méfier de l'hémorragie du sujet jeune hors contexte (sarcome de Kaposi).

    Conjonctivites

                    L'acuité visuelle est peu ou pas modifiée, il y a peu ou pas de photophobie. La rougeur est due à une hyperhémie des vaisseaux conjonctivaux diffuse, plus ou moins soutenue avec sensation de sable.

    -          Conjonctivite bactérienne : sécrétions purulentes abondantes.

    -          Conjonctivite virale : sécrétions moins abondantes, non purulentes, prurit. Rechercher une adénopathie pré-tragienne, notion épidémique avec contagiosité importante (manuportage).

    -          Conjonctivite allergique : antécédents, prurit important, peu de sécrétions, notion saisonnière. Parfois à la suite de frottements intempestifs, apparition brutale d'un œdème conjonctival majeur (chémosis) mais encore plus bénin qu'impressionnant.

    ŒIL ROUGE DOULOUREUX NON TRAUMATIQUE

    La rougeur est intense, due à une hyperhémie marquée des vaisseaux conjonctivaux, avec un renforcement autour de la cornée : le cercle périkératique.

    Glaucome aigu par fermeture de l'angle

                La douleur et la baisse d'acuité visuelle dominent le tableau fonctionnel, avec une acuité inférieure à 1/20 souvent réduite aux perceptions lumineuses, une douleur majeure oculaire, rétro oculaire et péri oculaire décrite parfois comme des céphalées diffuses si intenses qu'elles peuvent occasionner des nausées, vomissements pouvant faire égarer le diagnostic.

                    La cornée a perdu sa transparence, elle apparaît «glauque ».

                    Il existe une semi-mydriase aréactive.

                    L'œil est dur classiquement comme une bille de bois (on le palpe à 2 doigts à travers la paupière supérieure, regard en bas, en comparant avec l'autre œil ou son propre œil).

                    C'est une urgence ophtalmo absolue (à traiter dans les 6 heures sinon risque de séquelles graves).

    Uvéite

                La baisse d'acuité visuelle est variable souvent marquée, la cornée reste transparente avec un reflet brillant, la pupille est en myosis. La douleur est présente, intense mais sans commune mesure avec un GFA. Les causes sont variées, locales, régionales ou générales. Il faut encore une fois éliminer un épisode traumatique plus ou moins récent et adresser à l'ophtalmo dans les 24h. Attention aux opérés récents (<1 mois), aux diabétiques «tarés » ou le risque d'endophtalmie devient une urgence absolue.

    Kératite

                La baisse d'acuité visuelle est modérée, la douleur est marquée mais souvent circonscrite à l'œil, avec sensation de corps étranger. La cornée peut paraître normale ou présenter une ou plusieurs opacités plus ou moins intenses, fixant la plupart du temps la fluorescéine. Il peut s'agir d'une kératite virale à adénovirus le plus souvent, fluo –  ou d'une kératite herpétique avec fluorescence en carte de géographie ou dendritique. La kératite à adénovirus peut être traitée par antiseptique et AINS locaux, être adressée à l'ophtalmo en deuxième attention en l'absence d'amélioration, mais la constatation d'une opacité ou d'une fluorescence positive rend nécessaire le contrôle ophtalmo dans les 24 heures.

    II - ŒIL BLANC (CALME)

             Par œil blanc (ou calme), on entend œil non rouge. Il faut apprécier l'existence d'une baisse d'acuité visuelle, sa vitesse d'apparition, sa constance, son importance, les circonstances d'apparition, les signes d'accompagnements. Parmi ceux ci, on peut avoir des douleurs (topographie, horaire), myodésopsies, phosphènes, amputation du champ visuel, et il faut examiner la pupille.

                    Parmi les causes suivantes, certaines ne sont pas des urgences au sens proprement dit mais sont parfois rapportées … en urgence et il faut savoir les reconnaître.

    ŒIL BLANC DOULOUREUX

    Trouble de la réfraction

                    La baisse d'acuité visuelle est intermittente, déclenchée par les efforts visuels : lecture, écran, néons, conduite automobile, tableau, est plus volontiers vespérale et s'accompagne en général de douleurs oculaires modérées, parfois de céphalées, de prurit et quelquefois d'une discrète rougeur oculaire. Il s'agit le plus souvent d'une hypermétropie, d'un astigmatisme ou d'une presbytie débutant. Il faut adresser à l'ophtalmo sans urgence.

    Céphalées

                    L'acuité visuelle est normale, il n'y a pas de douleur oculaire proprement dite ni d'asthénopie. Il ne s'agit pas d'un problème ophtalmologique et le recours à l'ophtalmo reste facultatif et secondaire dans le cadre d'un bilan de céphalées.

    Névrite optique rétro bulbaire

                    La baisse d'acuité visuelle est variable, d'installation rapide. Il existe parfois des douleurs oculaires, caractéristiques lorsqu'elles sont déclenchées ou augmentées par les mouvements oculaires d'une atteinte inflammatoire (virale, SEP). Le contexte peut être évocateur : femme jeune avec atcd de SEP, éthylo-tabagique (névrite optique  bilatérale en général), traitement de la tuberculose (ethambutol), artérioscléreux (NOIA, NOIC), Horton (urgence médicale), …

                    Le diagnostic est ophtalmologique (champ visuel, FO) à adresser en urgence relative.

    Uvéite torpide

                    Signes d'uvéite à minima avec œil pas ou peu rouge.

    ŒIL BLANC NON DOULOUREUX

    Baisse d'acuité visuelle lente

                    Il n'y a aucune urgence (sauf baisse majeure et/ou contexte particulier : diabétique, …) et c'est l'ophtalmologiste qui diagnostiquera une cataracte, un glaucome, une rétinopathie.

    Décollement de la rétine

                    Apparition récente de myodésopsies, phosphènes : il peut s'agir d'un simple décollement postérieur du vitré mais le FO dans la semaine est indispensable pour éliminer une lésion rétinienne.

    Amputation du champ visuel, de baisse d'acuité visuelle souvent précédée de myodésopsies ou phosphènes (FO urgent).

    Hémorragie du vitré

                    Baisse d'acuité visuelle brutale plus ou moins importante, avec myodésopsies +++ ou sensation de voile rouge.

    Occlusion de l'artère centrale de la rétine

                    La baisse d'acuité visuelle est brutale, totale et s'accompagne d'une mydriase aréactive mais avec un réflexe consensuel normal (il ne s'agit pas d'une paralysie pupillaire). Le contexte peut être évocateur : artériopathie, Horton, cardiopathie emboligène. Il ne s'agit malheureusement pas d'une urgence ophtalmo car les possibilités de récupération fonctionnelle, hors aberration de la vascularisation rétinienne ou artère sur numéraire, sont nulles au-delà de la 30° minute. Mais s'agit d'une urgence médicale absolue, le diagnostic étant confirmé par le FO, car cela peut traduire une poussée de Horton ou une pathologie emboligène (équivalent d'un AVC).

    Occlusion de la veine centrale de la rétine

                    La baisse d'acuité visuelle est variable, parfois modérée, le plus souvent marquée, les réflexes pupillaires sont normaux. Le contexte permet d'envisager le diagnostic : artériosclérose, diabète,… Le diagnostic repose sur le FO. Le pronostic est nettement plus favorable que pour l'occlusion de l'artère centrale mais il peut être grevé par le développement d'une rétinopathie ischémique, d'un glaucome néo-vasculaire.

    III - CONDUITE PRATIQUE

    ŒIL ROUGE

    Devant un œil rouge non traumatique, éliminer de façon certaine un … traumatisme ! ! !

    Ne pas utiliser de collyre corticoïde sans diagnostic.

    Non douloureux 

    Hémorragie sous conjonctivale : le recours à l'ophtalmo est inutile. On peut prescrire un traitement de soutien »,type Angiophtal, l'hémorragie s'éliminant progressivement en 8 à 10 jours. Se méfier du sujet jeune.

    Conjonctivite : traitement par un antiseptique local (Biocidan, Vitabact, …) +/- AINS local (Indocollyre, Voltarène,…). Adresser à l'ophtalmo en cas d'aggravation ou de persistance au-delà de 5 jours. Eviter le recours à des antibiotiques locaux de deuxième intention type Quinolone.

    Douloureux

    Glaucome par fermeture de l'angle : urgence absolue ophtalmologique. S'il existe un délai (éloignement géographique), injecter une ampoule de 500mg de Diamox IV et  instiller de la pilocarpine 2%. Les collyres mydriatiques sont contre indiqués.

    Uvéite :les myotiques sont contre indiqués. Le recours à l'ophtalmo doit se faire dans les 24 à 48h. S'il s'agit d'un opéré oculaire récent (<1mois, cataracte, glaucome, décollement de la rétine, greffe de la cornée), se méfier d'une endophtalmie : urgence ophtalmo absolue.

    Kératite : prescrire un antibiotique local avec un AINS et recourir à l'ophtalmo obligatoirement dans les 24-48h.

    ŒIL BLANC

    Eliminer un …trauma : projection de corps étranger minuscule et profond toujours possible si les circonstances s'y prètent (marteau contre pièce de métal), même avec un œil blanc …

    Douloureux

    Céphalées : bilan orienté, recours à l'ophtalmo en seconde intention si négatif.

    Trouble de la réfraction : avis ophtalmo sans urgence.

    Névrite optique, uvéite torpide : avis ophtalmo, pas de geste d'urgence.

    Non douloureux

    Neuropathie optique : éliminer une urgence médicale vasculaire, puis avis ophtalmo.

    Décollement de la rétine, hémorragie du vitré : avis ophtalmo dans les 24h, moins urgent en l'absence de baisse d'acuité visuelle ou d'amputation du champ visuel.

    Occlusion de l'artère centrale de la rétine : urgence médicale,  éliminer une pathologie emboligène, un Horton, diagnostic à confirmer en urgence par FO.

    Occlusion de la veine centrale de la rétine : pas de traitement d'urgence, avis ophtalmo rapide.

    http://www.esculape.com/ophtalmo/oeilurgen-nontrauma.html

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