• Petits verres et grandes vérités

    Petits verres et grandes vérités

    En France, un consultant sur cinq de médecine générale est dépendant à l’alcool et plus de 5 millions de personnes éprouvent des difficultés médicales, psychologiques et sociales en rapport avec ce toxique, selon l’association nationale de prévention de l’alcoolisme. Avec une consommation de 11 litres d’alcool par adulte et par an, notre pays se situe encore parmi les premiers du classement mondial. Cinquante mille décès sont imputables chaque année à l’alcoolisme et il représente la troisième cause de mortalité en France. Et, pourtant, bien des idées fausses circulent encore à son sujet.

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    Parmi les plus répandues de ces opinions erronées, celle que l’alcool “donne des forces”. C’est faux. Certes, l’alcool éthylique, ou éthanol, apporte 7 calories par g d’alcool lorsqu’il est métabolisé dans le foie, mais sa transformation produit aussi de l’acide lactique qui gêne le travail musculaire. De plus, ces calories sont dépourvues de pouvoir énergétique, en quelque sorte “vides”, car elles ne fournissent ni sels minéraux, ni protéines, ni vitamines. Comme la consommation d’alcool tend également à diminuer l’appétit, ce phénomène explique en partie pourquoi les grands buveurs présentent des carences en vitamines, qui peuvent déterminer des troubles cérébraux ou neurologiques.

    Par ailleurs, si la consommation d’alcool peut avoir initialement un effet stimulant chez certaines personnes en leur donnant un sentiment d’euphorie, lorsque la quantité d’alcool devient plus importante, elle provoque au contraire une somnolence car l‘alcool agit sur le système nerveux. Dans le pire des cas elle peut provoquer un coma.

    Les effets sur la sexualité n’existent pas plus. Au contraire, divers travaux ont montré que pour de faibles doses d’alcool, les performances masculines sont diminuées. Tout au plus, l’alcool provoque-t-il une certaine désinhibition en modifiant les centres de contrôle cérébraux des émotions !

    L’alcool ne réchauffe pas

    Cela ne sert pas non plus à grand chose de boire de l’alcool dans l’idée de se réchauffer. Certes, l’ingestion d’une boisson alcoolisée procure une sensation de chaleur en dilatant les vaisseaux sanguins présents sous la peau. Mais, la chaleur produite s’échappe immédiatement de l’organisme par les pores du revêtement cutané. A terme, la température corporelle est donc diminuée (d’un demi-degré pour 50 g d’alcool absorbé) et les personnes ayant beaucoup bu risquent l’hypothermie, parfois mortelle.

    La consommation d’alcool ne désaltère pas non plus. Elle tend même à induire une déshydratation, car l’alcool possède un effet diurétique. Cette perte d’eau pourrait être à l’origine de la sensation si désagréable de “gueule de bois”, qui ne réclame d’autre traitement que le repos, la consommation d’eau ou de jus de fruits en abondance et, éventuellement, la prise d’aspirine.

    Enfin, sachez que si vous avez abusé de la bouteille, la consommation d’un café ne pourra guère vous aider à vous dégriser, car celui-ci ne modifie pas le taux d’alcool dans le sang (alcoolémie). Diluer l’alcool dans de l’eau avant de le boire n’arrangera pas plus votre affaire. Malheureusement, pour éliminer les effets de l’alcool, une seule chose est efficace, le temps !

    En revanche, il est vrai que la consommation d’un repas influence la façon dont l’alcool est assimilé et module le taux d’alcoolémie. Lorsque l’estomac est vide, l’absorption de l’alcool est plus rapide. A l’inverse, la présence d’aliments solides et gras ralentit le passage de l’alcool dans le sang car il retarde le déversement du contenu de l’estomac dans l’intestin, avant que l’alcool ne traverse le tube digestif et n’atteigne le compartiment sanguin. Mais, cela ne règle pas tout car l’alcool ne sera éliminé que plus lentement.

    Plus de 4 heures d’élimination à la dose de 0,6 g/l

    En fait, le taux d’alcool sanguin monte assez rapidement après la consommation d’une boisson alcoolisée, en une demi-heure à jeun, en une heure lors d’un repas.

    Ensuite, l’élimination de l’alcool est assez longue, l’alcoolémie s’abaissant de 0,15 g/l par heure en moyenne. Quatre à 5 heures au minimum sont donc nécessaires pour qu’une alcoolémie de 0,6 g/l revienne à la normale, un taux atteint avec 2 ou 3 verres de vin maximum.

    Toutefois, il ne s’agit là que de généralités. Parce que leur taille est en général plus faible, les femmes sont plus sensibles que les hommes et la concentration d’alcool dans le sang s’accroît chez elles plus rapidement et dans des proportions plus importantes. Les personnes de faible poids et de petite stature voient également, en règle générale, leur alcoolémie augmenter plus fortement. Enfin, certains individus réagissent particulièrement mal aux effets de l’alcool car ils manquent d’une enzyme, l’acétaldéhyde déshydrogénase, qui a pour fonction d’éliminer l’un des principaux produits de transformation de l’alcool, l’acétaldéhyde. D’autres paramètres entrent aussi en jeu dans le niveau d’alcoolémie comme l’accoutumance à l’alcool, les capacités de transformation du foie ou la consommation de médicaments.

    Boire un petit coup, c’est agréable, mais…

    Une fois absorbé par le tube digestif, l’alcool se répand dans tous les tissus de l’organisme et il modifie l’activité du cerveau, d’où une sensation d’ivresse. En France, la limite autorisée pour conduire est, depuis le décret du 29 août 1995, de 0,5 g/l d’alcool dans le sang, mais des changements dans l’appréciation des distances et une diminution de la rapidité des réflexes apparaissent dès que l’alcoolémie dépasse 0,25-0,3 g/l. Certains pays comme la Suède n’autorisent donc la conduite automobile que pour une alcoolémie inférieure à 0,2 g/l. Au delà de 1 à 2 g/l apparaît une véritable ivresse et après 3 g/l le danger de coma est réel.

    Les calories apportées par l’alcool sont, pour la plupart, brûlées dans l’organisme ou transformées en graisses. Toutefois, une petite partie de l’alcool consommé est également éliminée par les reins ainsi que par les poumons, d’où la possibilité d’estimer indirectement l’alcoolémie grâce à un éthylotest effectué à partir de l’air expiré ou une analyse d’urines.

    Hors ses effets aigus, qui peuvent être source de comportements violents ou de décès par accident automobile (pas moins de 4000 par an en France), l’alcool est dangereux à long terme. En effet, il exerce une action toxique sur le foie, qui peut contribuer à le rendre peu à peu fibreux et donc incapable d’assurer ses fonctions habituelles de transformation des substances toxiques ou de fabrication des protéines (cirrhose). De plus, l’alcool favorise l’apparition de cancers (foie, oesophage), parfois de concert avec le tabac (larynx).

    Plusieurs études ont suggéré qu’une consommation de vin pourrait protéger en partie contre les affections cardiovasculaires et l‘infarctus du myocarde. Certaines substances contenues dans le vin rouge pourraient, en effet, accroître la fluidité du sang. Néanmoins, ces effets protecteurs sont modestes et ne s’observent que pour des consommations très raisonnables de vin, de l’ordre d’un à deux verres par jour. Au contraire, l’alcoolisme est mauvais pour le coeur car l’ingestion régulière d’alcool tend à accroître la tension artérielle et à détériorer le muscle cardiaque.

    Connaissez les doses d’alcool

    Pour vous protéger contre l’alcool, apprenez à mieux en apprécier les dangers.

    Sachez qu’un verre de vin ou de bière, un apéritif ou un digestif augmente l’alcoolémie de 0,3 g/l chez une femme de 50 kg et de 0,2 g/l chez un homme de 70 kg. Les verres de vin rouge, de bière, de digestif ou de whisky tels qu’ils sont servis dans les cafés comportent tous approximativement la même quantité d’alcool, soit environ 10 g d’alcool pur. Le titre de la majorité des vins est de 8,5 à 15° d’alcool, les bières 3 à 12°, le cidre en moyenne 5°, les cocktails 25° et les eaux de vies et les alcools 40 à 60°.

    Enfin, pour conclure, ne soyez pas trop dur avec les alcooliques en les accusant d’un manque de volonté. N’oubliez pas que l’alcoolisme est une véritable maladie dont il est très difficile de s’affranchir car la consommation chronique d’alcool crée une dépendance à la fois psychique et physique. En matière d’alcoolisme, comme pour bien d’autres affections, mieux vaut donc prévenir que guérir.

    Dr Corinne Tutin

    Forum Alcool

    http://www.doctissimo.fr/html/sante/mag_2000/mag0929/dossier/sa_2146_alcool_verite.htm

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