Dr Marc Timsit - Le diabète est l'une des premières causes de malvoyance et de cécité dans les pays
occidentaux. Les progrès des examens et du laser peuvent permettre à l'ophtalmologiste d'intervenir rapidement et efficacement pour freiner l'importance des complications oculaires.
La surveillance régulière de l'œil est la meilleure garantie d'une conservation de la fonction
visuelle. Tous les diabétiques encore apparemment sains doivent être surveillés tous les ans et de façon plus fréquente si des lésions sont déjà présentes.
Il existe deux formes principales de diabète :
Le diabète de type I, insulinodépendant, touchant 10 % des diabétiques. Lié à une carence en insuline,
il survient classiquement chez le sujet jeune. 95 % des patients ont une atteinte oculaire après 20 ans d'évolution.
Le diabète de type II, non insulinodépendant, où l'insulinémie est normale. Ce diabète est le plus
fréquent (3 % de la population occidentale) et le plus sournois. Les lésions oculaires peuvent s'observer dès le dépistage. Il survient chez les personnes d'âge mûr, le plus souvent
obèses.
Après un certain temps d'évolution, ces deux types de diabète peuvent se compliquer notamment sur le
plan oculaire, nerveux, cardiovasculaire et rénal.
La stabilité de la glycémie permet d'éviter ou d'atténuer l'importance des complications
ophtalmologiques.
Plus de la moitié des patients atteints de diabète présentent déjà des complications après dix ans
essentiellement parce que leur maladie est insuffisamment traitée. Si le taux d'hémoglobine glycosylée témoin de l'équilibre glycémique dans les deux mois précédents était inférieur à 6,5% ces
complications deviendraient rares.
Toute diminution de 1% de l'hémoglobine glycosylée
s'accompagne d'une diminution de 40% de la rétinopathie. L'équilibre strict de la glycémie est donc l'objectif fixé en permanence au diabétique. S'il n'est pas obtenu, des lésions irréversibles
de la microcirculation apparaissent après un certain temps. Elles sont provoquées par l'hyperglycémie et aggravées par des facteurs généraux dont la traitement s'impose: hypertension artérielle
surtout, obésité, anomalies lipidiques, tabagisme....
LA RETINOPATHIE DIABETIQUE connaît une évolution par étapes qui peut conduire à la cécité en l'absence de traitement. Elle connaît plusieurs
aspects que l'on classe après avoir effectué une angiographie en fluorescence. Cet examen, fondamental, consiste à photographier la rétine après avoir injecté un colorant dans une veine du
bras.
1. La rétinopathie diabétique débutante
Aucun signe fonctionnel n'accompagne la rétinopathie diabétique débutante qui ne sera découverte qu'à
l'examen du fond d'œil, l'acuité visuelle restant alors le plus souvent strictement normale pendant longtemps. L'existence de micro-anévrismes, de micro-hémorragies, d'une vasodilatation des gros
troncs veineux signe la naissance d'une rétinopathie débutante. Cependant, le fond d'œil n'est pas suffisant et il faut pratiquer systématiquement une angiographie
fluorescéinique pour dépister les premiers signes d'atteinte capillaire.
2. La rétinopathie pré-proliferante et proliférante
En l'absence de traitement efficace, la poursuite de la perturbation glycémique va entraîner deux
sortes d'atteinte des capillaires. Leur occlusion provoque l'ischémie (défaut d'oxygénation des tissus). L'hyperperméabilité de leur paroi provoque l'œdème (passage du plasma sanguin dans les
tissus avoisinant) et les hémorragies (passage des globules rouges).
Pour lutter contre l'ischémie, la rétine va sécréter des facteurs de croissance qui vont activer la
fabrication des néovaisseaux, redoutables : c'est le stade de la rétinopathie pré-proliferante puis proliférante. Les néovaisseaux sont fragiles et peuvent donc se rompre et être
à l'origine d'hémorragie dans le vitré. Ils peuvent aussi entraîner un décollement de la rétine par traction ou un glaucome quand ils atteignent l'iris.
Cette forme de rétinopathie diabétique peut être évitée par une photocoagulation au laser
argon orientée par les examens angiographiques. Le traitement de la rétinopathie diabétique pré-proliferante et proliférante est bien codifié. Ce traitement vise à détruire les
territoires ischémiques par des photocoagulations au laser et à éviter ainsi le développement des néovaisseaux. Il réduit de façon importante le risque de cécité totale du diabétique. Le
traitement peut être quasi total (photocoagulation pan-rétinienne ou PPR) ou focal, localisé. Suivant l'importance et l'étendue des lésions le nombre de séances varie de 1 à 10 (voire plus). La
destruction rétinienne par coagulation supprime les zones rétiniennes gourmandes en oxygène et stoppe la sécrétion des facteurs de croissance. La suppression des zones malades sauvegarde les
secteurs primordiaux. La photocoagulation panrétinienne peut être plus ou moins serrée et étendue et se compliquer d'œdème maculaire à éviter par une bonne programmation des séances de
laser.
Au stade de rétinopathie proliférante, la prolifération vasculaire entraîne le développement
d'adhérences très fortes entre le vitré et la rétine partout où existent des néovaisseaux. Dans un second temps la traction sur la rétine va entraîner un décollement de la rétine. Cette traction
s'accompagne d'hémorragies volontiers récidivantes dans le vitré se nettoyant plus ou moins spontanément. Parfois la néovascularisation intéresse l'iris qui se couvre d'un réseau vasculaire
hémorragique (rubéose irienne) et qui peut obstruer totalement l'angle irido-cornéen (glaucome néovasculaire). Cette rétinopathie proliférante peut être évitée par un suivi régulier des
diabétiques, un traitement laser précoce associé à une normalisation de la glycémie. Une chirurgie (vitrectomie) peut être effectuée dans les formes compliquées ou menaçantes. Elle reste parfois
le seul traitement possible une fois le laser totalement effectué mais elle présente un risque opératoire et est parfois inefficace..
3- L'œdème maculaire
La macula est une petite zone centrale de la rétine (d'environ 5 mm de diamètre) située juste dans
l'axe visuel, qui permet la vision précise : la lecture, l'écriture, la reconnaissance des détails, des couleurs.
La cause la plus fréquente de chute définitive de l'acuité visuelle est l'œdème maculaire. Un œdème
prolongé conduit à une perte définitive de l'acuité visuelle de près (lecture). C'est une complication grave, la plus difficile à traiter. Le traitement est souvent décevant et nécessite diverses
actions médicales ou chirurgicales dépendantes de chaque cas.
Elle peut parfois bénéficier d'un traitement par photocoagulation au laser. Deux types de traitement
sont possibles :
- la photocoagulation au laser directe, focale de lésions responsables de
l'exsudation.
- la photocoagulation au laser en grille autour de la macula, indiquée en cas d'œdème diffus.
Ce traitement, s'il est précocément entrepris avant que la baisse visuelle soit trop importante est la
stratégie thérapeutique la plus efficace. Il permet de réduire de moitié le risque de perte de vision par rapport aux yeux traités plus tardivement.
- L’injection intra-vitréenne de corticoïdes ou d'anti VGEF a un
effet bénéfique. Elle permet souvent de gagner une ligne ou deux de vision et de diminuer l'importance de l'œdème. La récidive après 6 mois est de règle et nécessite de nouvelles
injections.
- Un traitement médicamenteux, la rubauxistaurine, est actuellement à l'étude et semble avoir un effet
positif sur la survenue des œdèmes maculaires.
- Si une adhésion au vitré est présente il est possible de proposer un acte
chirurgical (vitrectomie).
LA CATARACTE chez le diabétique est précoce et peut empêcher la surveillance du fond d'œil. Le geste chirurgical ne diffère pas
de celui d'une cataracte classique, l'implantation d'un cristallin artificiel pouvant se faire sans problème. Cette intervention peut s'effectuer sous anesthésie loco-régionale (péri bulbaire)
voire aussi sous anesthésie topique (collyre anesthésique).
Le risque infectieux est plus important dans le diabète. C'est pourquoi, avant toute décision
chirurgicale, il est impératif d'éliminer une infection notamment urinaire et de renforcer les précautions d'aseptie normales.
LE GLAUCOME est plus fréquent chez le sujet diabétique que chez le sujet sain. Son dépistage systématique peut permettre
d'éviter la perte de vision irréversible provoquée par l'atteinte du nerf optique.
Le diabète n'est pas une maladie bénigne. Le risque d'atteinte visuelle s'accroît avec l'ancienneté et l'importance du déséquilibre
glycémique, l'absence de surveillance oculaire. La collaboration entre le médecin, l'ophtalmologiste et le patient donne la chance d'une conservation de la fonction visuelle à long terme. Un
traitement rapide doit suivre la découverte d'anomalies
http://ophtalmologie.fr/diabete-oeil-yeux-laser.html