• Diabète sucré et ostéoporose

    DIABÈTE SUCRÉ ET OSTÉOPOROSE
    Georges Weryha (1), Demba Diedhiou (1), Louis Fiorani (1), Bruno Sutter (2)
    dimanche 6 janvier 2008
    par Georges WERYHA
    Sur le Web Le site du GRIO

    Le diabète sucré est, comme l’ostéoporose, un enjeu de santé publique pour la première moitié du XXIème siècle. La prévalence du diabète sucré atteint 8% de la population adulte et augmente régulièrement. La prévalence de la maladie ostéoporotique dans les deux sexes pose la question de l’existence d’un lien entre les deux maladies, de sa causalité et de la mise en place d’une prévention croisée multidisciplinaire. Le diabète sucré regroupe deux grandes maladies dont le déterminisme, le terrain et les conséquences sont profondément différents. Le diabète de type 1 est une maladie autoimmune qui touche les sujets jeunes. Il est insulinoprive, habituellement sans surcharge métabolique. Sa longue évolution touche toute la vie et se caractérise par l’apparition de complications dégénératives micro et macro-angiopathiques. Le diabète de type 2 associe une surcharge métabolique, un hyperinsulinisme et une insulino-résistance. Il s’installe habituellement à partir de l’âge de 50 ans et glisse lentement vers l’insulino-requérance et les complications cardiovasculaires. Son développement est contemporain de l’installation de la maladie ostéoporotique. Les liens entre le diabète et la maladie ostéoporotique peuvent être abordés de 6 façons différentes : sur le plan fondamental, les relations entre le métabolisme osseux, les facteurs de croissance et les hormones digestives ; l’impact des diabètes de type 1 et de type 2 sur la masse osseuse ; l’impact des diabètes de type 1 et de type 2 sur le risque fracturaire. Les effets iatrogènes osseux des médicaments du diabète sont abordés dans une communication au cours de cette journée.

    Les éléments fondamentaux :

    La carence en insuline et en amyline d’origine pancréatique est associée à une diminution du métabolisme osseux. Les modèles animaux mettent en évidence une diminution de la densité minérale osseuse moyenne qui s’installe rapidement après induction d’un diabète expérimental. L’inhibition chronique de l’axe somatotrope est responsable d’une baisse du taux circulant d’IGF-1. Il en résulte une diminution de l’anabolisme osseux et une diminution de la synergie entre l’IGF-1 et les stéroïdes sexuels masculins ou féminins. Au cours du diabète de type 2, la surcharge pondérale modifie le métabolisme de la leptine et des autres hormones digestives. Mais, l’impact de ces altérations physiopathologiques reste purement théorique.

    Risque fracturaire et diabète de type 1 :

    Le diabète de type 1 est associé à une augmentation significative du risque de fracture de l’extrémité supérieure du fémur. La synthèse effectuée par M.Janghorbani (1) reprend les résultats des 6 études cas-témoins disponibles. L’augmentation du risque est systématique avec une hétérogénéité non significative. Le risque relatif était égal à 8,9 par rapport à une population témoin. L’intervalle de confiance est compris entre 7,1 et 11,2. Ces valeurs tiennent compte de l’exclusion de l’étude de Vestergaard (2) qui introduit une hétérogénéité importante dans le calcul d’ensemble (RR global = 6,3[IC95%2,6-15,]). Les données disponibles pour les autres types de fracture sont moins cohérentes mais montrent une augmentation du risque au niveau des sites rachidiens et appendiculaires.

    Risque fracturaire et diabète de type 2 :

    Le diabète de type 2 est associé à un risque fracturaire modérément augmenté. L’hétérogénéité des populations et l’interférence de nombreux facteurs de confusion rendent compte des contradictions relevées dans les études. Le risque de fracture de l’extrémité supérieure du fémur a été étudié par une étude cas-témoin et 11 études de cohorte. Le risque relatif calculé par la méta-analyse est égal à 0,8. il n’est pas significativement différent de 1 puisque l’intervalle de confiance est compris entre 0,6 et 1 2. La suppression des 3 études responsables de l’hétérogénéité des données augmente significativement le risque fracturaire (RR=1,8[IC95%1,5-2,2]). La prise en compte de l’âge, du poids et de l’activité physique comme facteurs de confusion ne modifie que peu le résultat final (RR=2,6[IC95%1,5-4,5]). Les études du risque fracturaire aux autres sites squelettiques sont contradictoires. La réunion de l’ensemble des fractures à l’exclusion des fractures de l’ESF montre dans une étude un résultat positif (RR=1,3[IC95%1,1-1,5]). La protection liée à la surcharge pondérale pourrait être contrebalancée par l’augmentation du risque de chutes.

    Diabète de type 1 et densité minérale osseuse :

    Chez l’enfant, le développement du peak bone mass apparaît influencé par l’apparition d’un diabète de type 1 au cours de l’enfance. Les données sont parcellaires. Les résultats vont de l’absence d’impact du diabète et du contrôle glycémique à un déficit de 1,1 T-score avec un effet délétère du mauvais équilibre métabolique. Chez l’adulte jeune dont le diabète évolue depuis 10 ans ou plus, la célérité de la perte de masse osseuse est augmentée. La proportion de patients ostéopéniques est voisine de 45% chez les diabétiques contre 30% chez les témoins. Les ostéoporoses radiologiques sont retrouvées chez 15% des malades. La masse osseuse basse est associée à des taux plasmatiques diminués d’IGF-1 et des marqueurs du remodelage osseux. Dans les formes évoluées, les complications micro et macro-angiopathiques sont souvent citées comme des prédicteurs d’une masse osseuse basse. La rétinopathie est associée à une ostéopénie trois fois sur quatre alors qu’elle n’est présente qu’une fois sur deux chez les autres diabétiques. Les complications dégénératives sont souvent associées à une réduction des capacités physiques qui peut rendre compte d’une partie du déficit de masse osseuse. Certains auteurs avancent que l’insulinothérapie intensive limite le déficit de DMO.

    Diabète de type 2 et densité minérale osseuse :

    Les résultats des études épidémiologiques sont très peu probants. L’augmentation du risque fracturaire peut s’expliquer par l’augmentation du risque de chutes qui touche 25% des diabétiques âgés contre 15% dans une population de référence. Par contre, il n’existe pas de déficit de densité osseuse dans la population diabétique de type 2. Certaines études trouvent des valeurs supérieures. Ces résultats s’expliquent par une corrélation très forte entre la DMO et le poids. Il est à noter que les taux de vitamine D circulants sont bas dans la population des diabétiques de type 2.

    CONCLUSION :

    Le risque ostéoporotique est clairement associé au diabète de type 1. La vigilance du clinicien doit se manifester aux trois âges de la vie afin d’optimiser l’acquisition du peak bone mass, de réduire la perte de masse osseuse et de traiter l’ostéoporose au moment de l’apparition de la fracture sentinelle, des chutes et des déficits sensoriels. Le diabétique de type 2 a un risque fracturaire modérément augmenté, ce qui nécessite un renforcement de la politique de prévention habituelle de la maladie ostéoporotique.

    Références :

    1 - Janghorbani M, Van Dam RM, Willett WC & Hu FB 2007 Systematic review of type 1 and type 2 diabetes mellitus and risk of fracture. Am J Epidemiol 166 495-505.

    2 - Hofbauer LC, Brueck CC, Singh SK & Dobnig H 2007 Osteoporosis in patients with diabetes mellitus. J Bone Miner Res 22 1317-1328.

    3 - de Liefde, van der Klift M, de Laet CE, van Daele PL, Hofman A & Pols HA 2005 Bone mineral density and fracture risk in type-2 diabetes mellitus : the Rotterdam Study. Osteoporos Int 16 1713-1720.

     
    Post Scriptum :
    Présenté à la journée scientifique du GRIO, le 18 janvier 2008

    http://www.osteoporoses.fr/spip.php?article4
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