• Comment surmonter une dépendance au sucre ?

    Comment surmonter une dépendance au sucre ?

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    Etre «accro au sucre», cela pourrait être avoir toujours quelques bonbons à portée de main, rentrer chez soi et dévorer une plaque entière de chocolat, tout en sachant que ce n'est pas.... une bonne idée. Mais pourquoi est-on dépendant ? Et que peut-on y faire ?

    Le scénario classique, c'est le plus souvent une femme (ce qui n'exclut pas les hommes !), qui, après une journée bien remplie, rentre chez elle et va tout de suite ouvrir son armoire pour dévorer des sucreries, du chocolat, des biscuits... Mais qui ne se sent pas mieux pour autant. « Elle a le sentiment d'avoir craqué, ce qui peut être dévalorisant. Elle éprouve un sentiment de perte de contrôle », explique Laurence Dieu, diététicienne au CHR de Mons-Warquignies et secrétaire générale de l'Union professionnelle des diplômés en diététique de langue française (UPDLF).

    Les pistes à écarter

    Pourquoi un tel comportement ? Il faut tout d'abord vérifier qu'il ne s'agit pas d'une maladie mentale comme la boulimie (ingestion de grandes quantités de nourriture, suivie de vomissements provoqués...) ou l'hyperphagie (alimentation excessive et compulsive, chez quelqu'un qui est plus ou moins constamment au régime et préoccupé par son poids).

    Il peut aussi s'agir d'un désordre métabolique. Il suffira d'en parler à son médecin traitant, qui fera faire un examen sanguin, par exemple. Cette prise de sang confirmera ou non cette piste.

    Autre hypothèse... toute simple : une alimentation insuffisante dans la journée. Cela peut prendre la forme d'un petit coup de pompe (hypoglycémie) dans la journée: pour se remettre en selle, on mange un aliment sucré, capable de faire remonter la glycémie en quelques minutes, et on se sent « dopé ». « On peut avoir une compulsion alimentaire si on ne s'est pas suffisamment nourri, précise Laurence Dieu. Si la faim est trop grande, le corps va tout faire pour avoir une accumulation de calories. Dès qu'il y a à nouveau une disponibilité alimentaire, le corps se rattrape et si nous sommes dysrégulés, nous dépassons alors souvent la satiété. C'est donc ici un problème d'écoute de la régulation interne de la faim, de la satiété et du rassasiement. Cela arrive chez les femmes qui font attention à leur ligne et qui se privent pendant la journée, pour finalement craquer ».

    Une dépendance psychologique

    Etre véritablement « accro au sucre », cela peut être une dépendance psychologique. « Cette compulsion alimentaire permet d'anesthésier nos émotions vécues comme négatives. Si nous n'arrivons pas à gérer la colère, la tristesse, qui sont pourtant des émotions normales, nous pouvons alors nous tourner vers le sucré pour nous faire plaisir et contrecarrer ces émotions. »

    La consommation de sucre serait donc une réponse possible au stress, au mal-être, aux situations difficiles... « Certaines personnes ne savent pas reconnaître leurs émotions, ou bien elles n'ont pas appris à les gérer. Elles sont alors dans une situation inconfortable, et la compulsion alimentaire permet, facilement et instantanément, d'anesthésier ces émotions. Manger un morceau de chocolat, un petit biscuit, c'est facile, pas cher, et cela ne prend pas de temps, explique Laurence Dieu. La compulsion alimentaire est incontrôlable, car elle est le seul moyen d'apporter une réponse aux émotions qu'on n'arrive pas à gérer ».

    Pourquoi aime-t-on tellement le sucre ? Bien sûr, nous avons tous une attirance naturelle vers le sucré. Des études montrent que cette préférence existe déjà pendant la vie utérine... Mais c'est aussi parce que le sucre (tout comme la nicotine de la cigarette) stimule la production d'endorphines et de sérotonine, deux neurotransmetteurs qui ont une influence positive sur notre humeur. Instinctivement, nous le sentons, le sucre nous permet de retrouver rapidement un sentiment de bien-être, de détente... Cigarette et sucre ont cela en commun : la recherche de plaisir immédiat.

    D'ailleurs, le parallèle ne s'arrête pas là. « Un accroc au sucre privé de sucre sera dans un état similaire à un accro à la cigarette privé de tabac, note Laurent Devoitille, psychologue à la Polyclinique d'Ans-Alleur. Si nous partons de l'hypothèse que la consommation du sucre permet d'apaiser les tensions et le stress, à partir du moment où sa consommation sera envisagée comme solution de soulagement à la tension nerveuse, celle-ci ne fera que croître jusqu'à ce que la consommation ai eu lieu ».

    Voir le sucre comme la seule source de plaisir peut aussi être accentué par des habitudes datant de l'enfance. « Dire à un enfant qu'il sera privé de dessert s'il ne finit pas ses épinards crée un mauvais rapport au sucre : symboliquement, il va l'idéaliser », explique Laurence Dieu.

    « De même, si, enfant, je recevais un bonbon comme récompense, alors aujourd'hui, quand je vais mal, je me dirigerai plus facilement vers le sucre parce que je sais qu'il m'était donné, à l'époque, dans un moment agréable, souligne Laurent Devoitille. Je vais chercher à recréer cette association en faisant le chemin inverse: je prends du sucre parce que j'ai, à ce moment précis, besoin d'être réconforté. Si je suis angoissé, stressé, ma réaction inconsciente sera donc d'aller chercher un aliment sucré.

    On parle de trouble du comportement alimentaire lorsque, face à certains stimuli, nous réagissons de façon inadéquate: consommer du sucre n'est certainement pas la bonne réponse à ces stimuli négatifs, puisque cela ne va rien résoudre ».

    Doit-on culpabiliser dès qu'on a envie d'un morceau de chocolat ? « Non, il est normal de trouver du plaisir à manger sucré, rassure Laurent Devoitille. La différence avec un comportement normal, ce sera ici la fréquence et l'intensité, le caractère systématique. A l'extrême inverse, d'ailleurs, il serait tout aussi anormal de s'en priver.

    Manger normalement, c'est manger d'un peu de tout, y compris du gras, du sucré, des frites, etc... Accepter ceci, c'est déjà un pas vers le succès: il faut être modéré dans son comportement, et non pas extrémiste.

    On peut faire un parallèle avec l'alcoolisme: certains, en rentrant du bureau, vont prendre un verre de vin « pour se détendre ». En soi, ce n'est pas un drame! Mais le problème, c'est le comportement: on devrait pouvoir se détendre autrement qu'avec un verre de vin. C'est un comportement potentiellement à risque ».

    Et la santé ?

    Faut-il d'abord s'inquiéter pour sa ligne ? Pour certains, cet excès de sucre se verra effectivement sur la balance, mais pour d'autres, cette compulsion alimentaire n'aura pas forcément d'incidence sur le poids. « L'excès de poids vient surtout d'un excès calorique, souligne Laurence Dieu. Si la personne ne mange pas grand-chose d'autre que du sucre, il n'y aura pas d'excès calorique, donc pas nécessairement de prise de poids. Mais c'est évident, il y aura de toute façon un mauvais équilibre alimentaire, avec des carences en vitamines, sels minéraux, fibres, etc. On ne peut pas se nourrir que d'aliments sucrés ».

    Par contre, pour les personnes susceptibles d'avoir une prédisposition au diabète (s'il y a des antécédents familiaux, par exemple), cette surconsommation de sucre pose un réel problème, en sollicitant trop le pancréas, ce qui risque de conduire au diabète plus rapidement. Un argument sérieux pour trouver une solution à ce comportement alimentaire...

    Comment s'en sortir ?

    Comment changer d'attitude ? Chaque trajectoire sera différente. Mais un certain nombre de choses peuvent être mises en place, pour aller dans la bonne direction... S'interdire définitivement tous les produits sucrés, les chocolats ou les biscuits ? Heureusement, ce n'est pas une bonne idée. « Ce n'est pas la solution, bien au contraire. L'interdiction de manger ces produits peut en fait renforcer cette compulsion, insiste Laurence Dieu. L'interdiction existe déjà, elle vient de la société, des médias, des professionnels de la santé : le sucre est accusé de tous les maux, tout comme les graisses. Mais un peu de sucre, ça va. Le problème, c'est l'excès ».

    Oui au plaisir

    Oui, on a le droit de profiter à fond d'un carré de chocolat, et sans culpabiliser ! « En effet, le meilleur moyen de faire passer une envie, c'est de la contenter. Le plaisir est nécessaire. Mais si vous voulez vous faire plaisir, alors faites-le bien ! Asseyez-vous, mettez-vous dans les meilleures conditions. Souvent, nous ne prenons même pas le temps de déguster, c'est quelque chose qu'il faut apprendre à faire... » De même, pour tous les repas, il est important de ne pas se disperser (regarder la télévision, se lever plusieurs fois pour diverses raisons) : « soyez à vos repas, profitez-en, prenez le temps », conseille Laurence Dieu.

    Quand le comportement alimentaire est régulé, le rassasiement permet l'arrêt de la prise alimentaire : les signaux internes du corps peuvent être l'éc£urement ou la diminution du plaisir éprouvé. « Par contre, lors d'une dysrégulation, le rassasiement est inaccessible, souligne Laurence Dieu. Un travail réalisé avec un diététicien peut alors aider le patient à retrouver une régulation saine et harmonieuse. » Par ailleurs, pour éviter une dysrégulation, il est nécessaire de maintenir une bonne répartition énergétique sur la journée, ainsi qu'un bon équilibre alimentaire.

    « Mangez des féculents (riz, pâtes, pain), car s'il y a un manque, le corps peut alors réclamer du sucre rapide à l'excès. »

    Identifier et rééquilibrer

    La prise en charge se fera aussi avec un psychologue. « Cette démarche pluridisciplinaire permet d'envisager toutes les pistes, explique Laurent Devoitille. C'est une démarche qu'en général, on ne fait pas à 20 ans, mais plus tard: il faut déjà un certain parcours de vie, une certaine maturité, pour arriver à une consultation psychologique dans ce cadre. En général, avant, on se contente d'aller chez un diététicien.

    Le psychologue va travailler sur deux tableaux: prévenir les situations susceptibles de déclencher une compulsion alimentaire, et leur trouver d'autres réponses. »

    La prévention consistera ainsi à étudier la vie de la personne, et essayer de comprendre ce qui déclenche le stress, pour agir sur ses causes.

    « Il faudra peut-être, par exemple, apprendre à mettre des limites pour réduire, voire éviter ce stress: en effet, notre éducation fait que nous avons souvent besoin de plaire, de toujours répondre positivement aux demandes qui nous sont formulées. Mais il faut parfois apprendre à être moins exigeant avec soi-même. Et si on est moins stressé, on se jettera moins sur le sucre. »

    Quant aux réponses adéquates à apporter, cela dépend de chacun. « Il existe une infinité de trucs, spécifiques à chaque situation de vie. Si vous êtes stressé en rentrant du travail, par exemple, peut-être que prendre un bain peut constituer une transition agréable entre travail et maison, plutôt que d'aller dans la cuisine manger quelque chose. Pour d'autres, ce sera prendre son vélo et aller faire un tour pour se changer les idées. » Chacun devra oublier ses mauvaises habitudes, ou plus exactement les mauvaises associations, et en apprendre de nouvelles, associer de nouveaux comportements, plus adéquats cette fois.

    Les coups de pouce

    En plus de cette prise en charge diététique et psychologique, le patient peut s'aider d'autres outils pour booster sa motivation et se donner toutes les chances d'arriver à ses fins. A chacun, selon sa personnalité, de trouver ce qui lui convient.

    L'hypnose. Comme pour d'autres dépendances ou blocages (cigarette, poids, etc.), le recours à l'hypnose peut apporter une aide ponctuelle appréciable. Quelques séances permettent de maîtriser l'auto-hypnose, pour reproduire, à tout moment, les outils de gestion qui aideront à passer les caps difficiles. (Institut denouvelle hypnose et de psychosomatique asbl, avenue Ducpétiaux, 72, 1060 Bruxelles. % 02 538 38 10).

    L'acupuncture. D'après ses partisans, cette ancienne technique chinoise permettrait d'atténuer les pulsions pour les aliments sucrés. Adressez-vous à un médecin qui pratique l'acupuncture. (Association des médecins acupuncteurs. 02/414 73 44 ou www.acupuncture.be )

    La respiration. Si vous faites un lien évident entre un coup de stress et votre envie de sucre, plusieurs techniques de respiration peuvent vous aider en apportant à ce coup de stress une autre réponse que la dose de sucre. Essayez la respiration abdominale, rien de tel pour se détendre et oublier votre carré de chocolat... Et on peut le faire partout, discrètement: au bureau, en voiture, chez des amis...


    Auteur: Gwenaëlle Ansieau | Mise en ligne: 18-07-2012 | Mise à jour: 18-07-2012
    http://plusmagazine.levif.be/fr/sante/alimentation/artikel/1822/comment-surmonter-une-dependance-au-sucre
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